Où j’invite Gabriel Attal à venir dans ma classe gratter la Patafix sur les murs
Vous êtes ici chez vous.
Bonjour Monsieur le Ministre. J’espère que vos premiers jours à l’Education nationale se déroulent bien. Pour cette première chronique de la saison, je souhaitais m’adresser à vous et vous souhaiter la bienvenue à l’Education nationale. Je suis enseignant depuis 25 ans, vous êtes ministre depuis deux mois : il me paraît à la fois naturel et courtois de vous accueillir dans cette belle maison.
C’est drôle parce que c’est la première fois que mon ministre est plus jeune que moi. Tous étaient plus âgés, à l’exception de Jack Lang. Il avait 61 ans quand il était ministre de l’Education nationale, j’en avais alors 27. Aujourd’hui, j’en ai 50, il en paraît 14. Etonnant non ?
J’ai lu que, régulièrement, vous souhaitiez vous installer quelques jours avec des membres de votre cabinet dans des établissements scolaires pour mieux appréhender la réalité du terrain. Venez donc dans mon école. Vous y êtes le bienvenu. Je suis dans l’Est de la France. Mais pas à l’Est, genre Colmar ou Strasbourg. Je préfère préciser. Je ne voudrais pas que vous pensiez que je travaille dans une école alsacienne.
Plus exactement, je suis dans le Nord-Est, à côté de Charleville-Mézières. En quittant Paris vers 7 heures du matin, en passant par l’A4 direction Reims, vous serez dans mon école entre 9 et 10 heures. Ça roule bien. L’année dernière, ça bouchonnait pas mal du côté de la rue Emile Nivelet. Mais heureusement, le collège du secteur vient de fermer donc c’est plus tranquille côté circulation.
Et puis dans mon école, il y a toute la place dont vous aurez besoin pour travailler. Un poste a été supprimé il y a deux ans : ça vous laisse une classe entièrement vide pour vous mettre à l’aise.
Bon, je vous préviens : dans ma classe c’est pas le grand luxe. J’accroche des serviettes de plage devant les fenêtres pour nous protéger de la chaleur. Ce n’est pas très beau mais on n’a pas le budget pour acheter des nouveaux stores. Les murs n’ont pas été repeints depuis… depuis le jour où ils ont été peints. Ça craque et ça s’écaille de partout. Remarquez si vous venez, on pourra discuter en grattant la Patafix sur les murs. A l’école publique, il n’y a pas de petites économies.
Vraiment, vous êtes le bienvenu dans mon école, et vous vous y installez le temps que vous voulez. On pourra faire un peu de tourisme. Charleville-Mézières est une très belle ville. Mais ce sera en soirée. Les élèves terminent leur journée de classe à 16h30. Ensuite, j’ai souvent des réunions et parfois des formations. Je préfère préciser parce que je vous ai entendu dire cet été que nos réunions et formations étaient proposés sur nos temps de cours. C’est une erreur. Mais vous venez d’arriver au ministère, c’est normal de se tromper. Je dis toujours à mes élèves : c’est en se trompant qu’on apprend. Vous c’est pareil. C’est en abayant aux corneilles qu’on apprend.
Monsieur le Ministre, je vous laisse regarder vos disponibilités dans votre agenda. J’ai bien conscience que cette invitation est un peu cavalière. Aussi, je vous laisse consulter votre directrice de cabinet pour que tout cela s’effectue en bonne et due forme. Ou plutôt, commençant à vous connaître, devrais-je dire : en bon uniforme.
A très bientôt Monsieur le Ministre.